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Un parfum de nos maux

être caissière aujourd'hui

1 Février 2008 , Rédigé par zazou Publié dans #société

Source: http://www.liberation.fr/actualite/economie_terre/307497.FR.php

«Ça va aujourd'hui mon amour?»
Le client, éméché malgré l'heure matinale, pose deux bières sur le tapis roulant de la caisse de Sonia , employée au Leader Price de la place de la République à Paris. Sonia répond d'un sourire contrit, même si non, ça ne va pas. «Il faut toujours sourire, ça fait partie du métier. Même quand on nous insulte, même quand on est fatigué, on doit sourire.»

 
Ce vendredi matin la jeune femme est à son poste en dépit du mouvement de grève des caissières pour la revalorisation des salaires. «Une grève? Je n'étais pas au courant. Ici personne n'est syndiqué. Si j'avais su, bien sûr que j'aurais fait grève!» Comme ses collègues, elle gagne 820 euros net pour 30 heures par semaine, et comme ses collègues, elle voudrait en faire cinq de plus, pour «être un peu moins dans la galère».

Pas au courant de la grève non plus, les employé(e)s du Lidl Strasbourg-Saint-Denis. «Si on avait su, tous les Lidl de France seraient en grève!», s'exclame Linda, une jeune caissière de 23 ans. Pas tant pour les salaires -–«800 euros pour 26 heures, c'est plutôt mieux qu'ailleurs»–, que pour avoir des horaires fixes. «Ils jouent avec notre temps, le planning change tout le temps. C'est fatiguant, c'est difficile pour la vie de famille, et ça empêche d'avoir un deuxième travail à côté».

«Augmentez les salaires»

Les 35 heures, les caissières du Carrefour du centre commercial Bercy 2 n'y pensent même plus. Ici, c'est 30 heures maximum, pour 830 euros net. Vendredi, ils étaient une trentaine, sur plus de 500 employés, à distribuer des tracts devant le magasin en scandant «Augmentez les salaires !», sous l'œil des agents de sécurité.

«La semaine dernière, on était bien plus a vouloir faire grève, explique un salarié du rayon textile. Mais la direction a dit qu'elle prendrait les noms. Résultat, on est trente. On sait qu'on ne nous fera pas de cadeau, mais on prend le risque. On connaît nos droits.»

Dimanche travaillés

Ce qui a mis le feu au poudre, c'est l'annonce par la direction que les employés devront travailler non plus cinq, mais 17 dimanches dans l'année. Sachant qu'après cinq dimanches ils seront payés comme un jour normal.

Salaires de misère, temps partiel subi, horaires à géométrie (très) variable, travail le dimanche et les jours fériés, heures supplémentaires non payées... Travailleurs précaires s'il en est, les salariés de la grande distribution cumulent les difficultés.

A commencer par l'absence totale de reconnaissance. «Le plus dur, c'est la pression de la direction, dénonce Leïla. La surveillance du matin au soir, les caméras. Les réflexions assassines. La suspicion à la moindre erreur de caisse. Si on est malade, on reçoit un recommandé pour nous dire qu'on perturbe toute la ligne de caisses, et on nous dit qu'on oblige nos collègues à se passer du peu de pauses qu'elles ont.» Pauses d'une demi-heure, déduites du salaire, pour sept heures de travail.

«On est des machines»

«On nous considère comme des machines, pour ne pas dire comme des chiens»,
résume d'un ton posé Sylvie, une ancienne. Après 18 ans de caisse, ce qui lui vaut le «privilège» d'être aux 35 heures, elle ne touche toujours que 1100 euros par mois. «Quand je vois passer des caddie à 1500 euros, et que je me dis que moi, mon frigo est vide, c'est dur.»

Quant aux heures supplémentaires, elles passent en «modulation»: si une caissière a quelques heures de trop sur son «compteur», on lui impose simplement de fermer sa caisse un peu plus tôt que prévu le jour suivant. En la prévenant «une heure avant».

«De toute façon, les chefs ne nous calculent même pas, reprend Leïla. Tenez, à Noël, qui est pour nous la période la plus dure le l'année, les chefs de rayon ont eu des I-pod, des fleurs, du champagne. Nous rien, par une boîte de chocolat ni même un merci.»
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S
Je vous remercie de donner vos lignes sur ce sujet car moi aussi je rend un grand hommage aux caissieres de francequi en matiere d'esclavage moderne , dans la distribution ils sont CHAMPION, elles n'ont pas de chance comme dans un CASINO, leur patron leur demande de faire de SUPER U comme des juments, même pas avec la carotte pour les faire avancer, ils se croyent GEANT, eh LECLERC de lune...!!! elles ont même pas le temps de le voir tellement qu'elles bosse dur.Au CARREFOUR de leur vie se trouve le desespoir de se battre dans le neant...!!!
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Z
«On est des machines»Même pas ! La grande majorité des humains, et pas seulement les caissières, ne sont que des boulons de la Grande Machine...Et pourtant, sans boulon... La Machine tombe en panne...Il faudrait ne pas l'oublier !Alors quoi ?Alors voici ce qu'est la majorité des humains :«La merde de ce monde prête à servir à tout»Et moi, révoltée d'être réduite à cet esclavage, je demande ce qu'attendent tous les autres boulons pour mettre la Machine en panne !Z.
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M
Tu vois Zazou, c'est un très bel hommage aux caissières que tu rends ici.Malheureusement, les choses ne semblent pas prêtes de s'améliorer et ce n'est pas les promesses électorales d'un showprésident qui arrangeront la situation de ces pauvres caissières.Le démantelement programmé du code du travail n'arrangera certainement pas la siuation ...Je te souhaite une très bonne soirée,Bises,
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H
Je ne sais pas comment çà se passe vers chez toi mais dans tout Paris, c'est vrai, c'est ainsi que les choses sont (et pas seulement dans la distribution alimentaire). Tu connais la formule " Le capitalisme, c'est l'exploitation de l'homme par l'homme" Tu nous présentes un exemple suplémentaire qui le démontre...
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E
Je me souviens quand notre camembert président a parlé de travailler les dimanches. Il a pris soin d'interroger une jeunette à la Fnac ou chez Virgin, je ne sais plus, qui était enthousiaste. Je me souviens m'être dit que son excuse, c'était justement son âge à la fillette.J'ai constaté une fois de plus la manipulation de notre gouvernement, et sans être concernée par ce métier, je les avais plaints sincèrement...Cela dit, j'apprends que le piège se referme en plus sur le fait que au bout de 5 dimanches, les employés sont payés un jour normal... Bizarrement, ça ne m'étonne pas. Et ça m'écoeure...Rien que le fait d'autoriser le travail l dimanche me paraissait déjà ignoble en soi... Mais là...
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